L’Alaska, la dernière frontière

Du 17 juillet au 16 août 2018

Nous voici enfin arrivés dans l’état le plus au Nord des États-Unis d’Amérique ! Russe jusqu’en 1867, collé au Canada… un drôle d’Etat que nous avions hâte de découvrir !

Quelle aventure de s’y rendre par la route ! C’est sur l’Alaska Highway (aussi appelée Alcan) que Cheezy nous a principalement trimbalés : 2232 kilomètres de Dawson Creek (Colombie-Britannique, Canada) à Delta Junction (Alaska, Etats-Unis). La Route de l’Alaska a vu le jour en 1942 en un temps record de huit mois dans des conditions sans doute épouvantables pour les corps armés… Mais pourquoi donc ? Pour l’effort de guerre. Le Japon ayant attaqué Pearl Harbor puis les îles d’Attu et Kiska lors de la Campagne des îles Aléoutiennes, il était indispensable qu’une liaison terrestre entre l’Alaska et le reste du continent soit construite. En 1948, cette route stratégique est ouverte au public. En 2018, Charles et moi la parcourons en profitant des dizaines d’ours, bisons et autres animaux qui broutent sur le bas-côté. Nos étapes préférées ? Les sources d’eau chaudes Liard, Muncho Lake et la forêt de panneaux de Watson Lake.

La partie de l’Alaska que nous avons visitée (quasiment l’intégralité accessible par la route) nous a paru moins sauvage que son voisin Canadien, le Yukon. Moins de gros animaux (mais des centaines de lapins !) hors parcs et réserves, plus de villages, de réseau téléphonique, de magasins. Même les gens avaient la conversation plus facile. Côté météo, le temps est passé de chaud et sec dans les terres à frais et pluvieux sur la côte et au sud. L’Alaska, ça a aussi été l’occasion de revoir des connaissances de voyage et ça, c’était vraiment chouette !

Un peu plus de détails…

Premier arrêt à CHICKEN, ville fantôme comptant 7 habitants en 2010 qui mise à fond sur le marketing 100% poulet (et on ne parle pas des nids de poules sur la route 😉 ). La Bresse a de quoi en prendre de la graine !

Puis, nous suivons les conseils des locaux et empruntons la DENALI HIGHWAY réputée pour ses paysages somptueux. Encore une route de graviers ! Cheezy ne nous remercie pas mais s’en sors comme une cheffe et file au moins à 60km/h.

Pour notre premier jour au DENALI NATIONAL PARK, nous explorons les sentiers de l’entrée du parc, assistons à une démonstration de chiens de traîneau, parcourons la vingtaine de kilomètres accessibles en voiture et nous informons sur les possibilités de camping et randonnées. Nous avons le choix entre le bivouac dans une zone du parc où nous devons nous inscrire préalablement ou les campings. Ne sachant pas quelle zone du parc choisir parmi les 87 pour nous assurer de belles randonnées hors-sentiers et après avoir visionné le film d’information sur les passages de rivières, les attaques d’originaux et de grizzlis, l’orientation dans les buissons, etc., nous avons choisi l’option à la cool et réservé des emplacements aux campings d’Igloo Creek et de Wonder Lake, le dernier de la route, le plus infesté de moustiques mais de loin le plus joli du parc. Il fait chaud et beau à Denali ! Nous faisons partie des ultra chanceux qui ont vu le sommet le plus haut d’Amérique du Nord (6190 mètres), pas un jour mais trois d’affilé ! D’ailleurs, vous le connaissez peut-être mieux sous le nom de McKinley, son nom de 1896 à 2015. Nous nous promenons par ci par là, nous baignons même dans le lac Wonder près du camping, randonnons dans les hauteurs à la recherche d’air frais et de vent pouvant chasser ces satanés moustiques, passons du temps dans le bus mais toujours les yeux grand ouverts car le chauffeur s’arrête dès que l’on détecte des animaux… et autant vous dire qu’ils y en a eu des arrêts grâce à mes yeux de lynx et les jumelles ! Caribous, orignaux, mouflons, ours bruns, ours noirs, on a été gâtés.

Rien de mieux qu’une bonne bière pour se désaltérer ! Direction la brasserie 49th State Brewing Co à HEALY. C’est ici que nous pouvons visiter la réplique du mythique bus magique d’Alexander Supervagabond ! Ça ne vous dit rien ? Lisez ou/et visionnez « Into the Wild », l’histoire d’un jeune américain qui a troqué la civilisation pour un retour à la vie sauvage. Le bus dans lequel Alexander a vécu existe toujours mais il faut compter plusieurs jours de marche et fin juillet, les eaux sont trop hautes et dangereuses pour être traversées.

Notre shoot de nature bouillonnant encore dans nos veines, nous sommes prêts à affronter la ville la plus peuplée d’Alaska, ANCHORAGE. Plus nous nous approchons de la côte, plus la météo se gâte… La ville nous paraît immense. Rien à voir avec Whitehorse. Cependant, les grands espaces sont à deux pas ! Nous dînons avec Sarah et Brian. Sarah, je l’ai rencontrée en Thaïlande, au marché nocturne de Sukhothaï en 2015 lors d’un voyage solo. Nous passons une superbe soirée en leur compagnie. C’est avec un naturel déroutant que nous discutons voyage, vie à l’étranger (Brian ayant vécu de nombreuses années en Allemagne), culture, langues, nature, sport, travail… Nous finirons par dormir dans leur quartier tranquille. Le lendemain, après la quête de Charles pour trouver l’appareil photo de ses rêves (tout en restant réaliste), nous terminons la journée attablés chez Sarah et Brian devant un délicieux repas et finissons par une douche bien méritée.

LA PÉNINSULE DE KENAI nous fait de l’œil mais qu’est-ce que ça s’annonce mal ! En route pour Whittier, nous ne voyons pas à deux mètres tellement il pleut et le temps est gris… Nous jugeons que le jeu n’en vaut pas la chandelle (et le prix du tunnel) et mettons le cap vers le sud. Coup de cœur pour HOMER où nous passons quelques jours à farnienter. Au programme, plage (pas en maillot de bain, faut pas rêver ! ), photographie d’aigles et du glacier Grewingk avec le nouveau joujou, long-board, jardins (Carl E. Wynn Nature Center)…

Le PARC NATIONAL DE KENAI FJORDS conquiert également notre cœur. Nous nous attaquons à l’impressionnant glacier Exit par un beau jour ensoleillé et restons bouche bée devant le champ de glace Harding.

Nous contactons ensuite Arlene et Danny qui nous avaient gentiment accueillis sur leur emplacement de camping à la Vallée de la Mort. Ils nous invitent à passer les voir ! Après un glacier de plus sur notre liste (Matanuska), nous arrivons dans leur magnifique demeure. Il n’y a pas à dire, nous sommes accueillis comme des rois partout où nous allons et nous ne sommes pas prêts de l’oublier lorsque l’on aura un chez-nous ! Ce couple d’aventuriers nous propose de passer du temps dans leur cabane au sein du PARC NATIONAL WRANGELL-ST ELIAS. C’est évidemment avec plaisir que nous acceptons et que nous partons pour une centaine de kilomètres de route de graviers. Il pleut des cordes pendant quelques jours mais que c’est bon de n’avoir aucun réseau téléphonique, de cuisiner, de lire au coin du feu, de jouer, de se balader à pied ou à vélo toujours en chantant faux pour effrayer les ours… Puis, Arlene, Danny, leur fils Dirk et ses cousins Leigh et Troy nous rejoignent. Ils logeront dans d’autres chalets construits par le couple et uniquement accessibles à pied. Nous nous joignons à eux pour une randonnée commentée par Danny, géologue à la retraite. Nous crapahutons dans les ruines de la mine de cuivre Bonanza. Arlene et son voisin Mark restés à la cabane nous ont préparé un festin de légumes locaux agrémentés de saumon sauvage d’Alaska pêché par l’équipage de Dirk. Hmmmmmm ! Le lendemain, Charles et moi visitons les bâtiments historiques et musées de MC CARTHY et KENNICOTT, puis partons pour une courte randonnée jusqu’au pied du glacier avant de rejoindre la troupe au restaurant. Nous finissons dans le jacuzzi chauffé au bois au milieu des bruits des animaux de la forêt et nous réfugions en hâte à l’intérieur lorsque nous croyons entendre des grognements..!

Vient ensuite l’une des expériences les plus improbables et folkloriques de notre voyage : la foire et la kermesse de KENNY LAKE ! Dans l’après-midi, je me rends avec Arlene dans ce petit village pour déposer les légumes, fleurs et artisanat qu’elle exposera et grâce auxquels elle raflera un bon nombre de prix. Les règles sont strictes : tant de pois, un chou-fleur de tel calibre, de belles feuilles de chou kale… Dîner participatif suivi d’une vente aux enchères de gâteaux concoctés par les habitants pour financer des bourses d’études de jeunes du village suivi d’une « dance »! Suivant les instructions d’une mamie au micro et la musique de l’orchestre dont Arlene fait partie, nous apprenons les danses traditionnelles (en ligne, carrées…) en riant à gorge déployée avec plein de jeunes et de moins jeunes clairement heureux d’être là. Un beau moment de partage et d’inclusion. Le lendemain, les stands de créateurs locaux, de politiciens, de fermiers, d’associations ainsi que les concerts nous ont bien occupés. Sans oublier la belle rencontre de Judith, française aventurière expatriée à Kenny Lake, qui s’occupe du journal local avec son mari et vit dans une maison faite maison, autonome et originale.

Sur les conseils avisés de nos hôtes de quelques jours, nous partons visiter le glacier Worthington puis VALDEZ. Ce sera l’occasion de jouer les vrais touristes et de nous payer le luxe d’une croisière à bord du bateau LuluBelle jusqu’au Glacier Columbia. Lions de mer, loutres de mer, orques, macareux, pygargues à tête blanche, le vêlage du glacier et les icebergs nous ont fait oublier le temps de chien et le mal de mer !

Il est temps pour nous de reprendre la route du Canada. Nous referons un passage éclair en Alaska, à HYDER, où nous avons eu l’honneur d’observer le plus gros des grizzlis à la pêche aux saumons !

Whitehorse et le Yukon, plus grand que nature !

17 juin au 17 juillet 2018

Je viens de retrouver cette note et ça me rappelle qu’on n’a pas encore publié d’article sur nos semaines passées à Whitehorse…

Foutu formatage. J’ai les idées floues.
Un job d’été mal payé ? Ou profiter du court été Canadien en sillonnant les routes du pays ?
Des horaires aléatoires et une probabilité élevée de ne pas avoir de jour de congé commun ? Ou explorer ensemble.
Intégrer une communauté pour quelques mois et s’épanouir en son sein ? Ou rencontrer et échanger le temps d’une soirée autour du feu, d’une pause café, le long d’un sentier.
Renflouer lentement mais sûrement les caisses ? Ou continuer à vivre sur nos économies.
Permis TRAVAIL vacances ? Ou permis VACANCES travail ?

Vous l’aurez compris, nous avons choisi la dernière option et terminons notre été sur les routes du Grand Nord, une expérience nouvelle, habitués que nous sommes au doux mélange estival sable/sel/crème solaire.

Après avoir mis à jour nos CV et prospecté le marché de l’emploi saisonnier de Whitehorse, nous nous sommes rendu compte que l’on trouverait des opportunités très rapidement en cas de coup dur.

Salut les « anciens » : « Ah la jeunesse, c’est plus ce que c’était ! Tous des fainéants ! Pierre qui roule n’amasse pas mousse ! » Et les plus jeunes : « Nous on galère à boucler les fins de mois et eux, ils se promènent. La chance. C’est pas donné à tout le monde. »

Certes. On est né du bon côté, tout comme vous les amis. On a pris des risques et mis nos carrières de côté pour ne pas finir aigris de ne pas avoir essayer de vivre ailleurs et autrement. C’est étrange de se dire que l’on voyage actuellement grâce à l’argent économisé lors de notre vie « active »… alors que nous passions nos journées entre quatre murs  en open-space le cul sur une chaise le nez collé à un ordinateur à gérer des projets si importants pour les partis impliqués qu’on en cauchemardait rêvait la nuit. C’est sûr que l’on ne se heurte plus aux mêmes problématiques en voyage mais on apprend tout autant, voire plus en ce qui concerne les compétences humaines.

Assez disserté. Profitons de notre liberté toute relative pour vous conter nos aventures.

Tout d’abord, nous n’aurions pas pu rester si longtemps à Whitehorse sans  les formidables Mélanie, Stéphane et Kroutchouk (rencontrés à Yellowknife grâce au site Couchsurfing, souvenez-vous) chez qui nous nous sommes pour ainsi dire installés… Mille milliards de mercis ! Ils parlent de nous sur leur blog ici, ici et ici.

On a bien randonné, mangé (principalement végétalien), et campé :
Fish Lake

Grey Mountain via Money Shot Trail

Caribou Mountain

Miles Canyon

Kusawa Ridge

Parc national et réserve de Kluane

Haines, certes en Alaska mais nous y sommes allés avec Mélanie et Stéphane en van jusqu’à Skagway puis en ferry. On a pu observer pour la première fois de notre vie un feu de forêt impressionnant… sans risque pour nous puisqu’il était de l’autre côté du lac.

Et pris le temps de vivre plus posément : lire, se balader au bord du fleuve Yukon, pratiquer le yoga dans le parc, visiter des musées, participer à des événements…

La gay pride
Le solstice St-Jean
La Journée Nationale des Peuples Autochtones le 21 juin célébrant le patrimoine, la diversité culturelle et les contributions des Premières Nations, des Inuits et des Métis au Canada.
Canada Day, la fête nationale le 1er juillet commémorant la date de formation de la fédération canadienne par la Reine Victoria en 1867.
Le festival culturel Adäka en l’honneur des Premières Nations.
Arts in the Park, des concerts pendant la pause déjeuner du lundi au vendredi.

Puis nous avons depuis repris la route vers le Nord, direction Dawson City. Nous en parlions dans notre article sur le Chilkoot Trail… c’est dans cette ville que les prospecteurs espéraient s’enrichir ! La ville d’aujourd’hui vit principalement du tourisme : spectacles de French Cancan, croisières sur le fleuve Yukon, canoës, le fameux Sourtoe Cocktail (shot d’alcool fort agrémenté d’un orteil momifié) et de nombreuses activités liées à la Ruée vers l’Or. Niveau nature, on a vu mieux, les alentours ayant été bien altérés par l’industrie minière et ses énormes barges qui, en séparant l’or des autres roches, recrachaient des montagnes de graviers.

Après avoir fêté la victoire de la France dans un bar pro-croates et apprécié une bonne douche au camping de la ville, nous embarquons Cheezy ornée de son nouveau pneu sur la Dempster Highway,  très longue route de gravier (et de roches acérées !). Mais pourquoi donc ? Parce que nous avons envie d’atteindre le cercle polaire, Inuvik voire Tuktoyaktuk au bord de l’Océan Arctique.  Au matin du deuxième jour, le temps s’est bien gâté et nous crevons après seulement deux kilomètres. Ça va, nous avions prévu le coup et Charles change la roue dans la boue comme un chef ! On nous informe que les 100 prochains kilomètres de route sont désastreux. Hum, il nous reste la roue de secours (la galette)… Allez en voiture ! Nous évoluons lentement entourés d’arbres brûlés, de brume, dans un sorte de décors de fin du monde. Quinze kilomètres plus tard, nous vérifions les pneus et croyons avoir droit à une deuxième crevaison, un pneu arrière étant fortement dégonflé. Nous préférons faire demi-tour, la météo et la chance n’étant visiblement pas au rendez-vous. Nous avons donc atteint le kilomètre 270, à seulement 130 kilomètres du cercle polaire et repeint Cheezy !

Il faudra donc que nous revenions pour la descente du Yukon en canoë, la Dempster Highway avec de meilleurs pneus et des randonnées dans le magnifique parc Tombstone ! On a déjà hâte !

De retour à Dawson City, nous rencontrons un voyageur français qui nous subjugue avec ses histoires de tour du monde en stop, de transatlantiques épiques si bien que nous finissons la soirée autour d’un verre (ou deux) et d’une belle partie de fléchettes ! Le lendemain matin, nous laissons Arthur à la sortie de la ville et allons faire réparer notre pneu.

Nous nous engageons ensuite sur une route splendide qui porte bien son nom, la Top of the World Highway et passons la douane la plus au Nord de toutes les douanes américaines ! Bienvenue en Alaska !